La rĂ©ponse au "qui ?" se tire du je lui-mĂȘme, du "sujet", du "soi-mĂȘme". Il est cela qui, Ă travers la variation des comportements et des vĂ©cus, se maintient comme identique et reste par lĂ en rapport avec cette multiplicitĂ©.(...)
Et qu'y a-t-il de plus indubitable que ceci : le je est un donnĂ© ? Et cet ĂȘtre donnĂ© n'exige-t-il pas pour ĂȘtre Ă©laborĂ© d'ĂȘtre pris Ă la source, abstraction faite de tout autre "donnĂ©", non seulement d'un "monde" Ă©tant mais bel et bien aussi de l'ĂȘtre d'autres "je" ? Peut-ĂȘtre cette maniĂšre de se donner qu'offre la simple, formelle, rĂ©flexive perception du je est-elle effectivement Ă©vidente. (...)
Et si cette sorte d'"autodonation" du Dasein Ă©tait pour l'analytique existentiale une fausse piste et, Ă vrai dire, une tentation ayant son fondement dans l'ĂȘtre du Dasein lui-mĂȘme ?(...) Et si la constitution du Dasein, selon laquelle il est chaque fois Ă moi, Ă©tait la raison pour laquelle d'abord et la plupart du temps le Dasein n'est pas soi-mĂȘme ?(...) Le "je" doit ĂȘtre seulement entendu au sens d'une indication n'engageant Ă rien de plus, indication formelle de quelque chose qui, dans chaque contexte d'ĂȘtre phĂ©nomĂ©nal, peut Ă©ventuellement se rĂ©vĂ©ler comme son "contraire". Mais ici "non-je" ne se ramĂšne alors en aucune façon Ă l'Ă©tant par essence dĂ©nuĂ© d'"Ă©goĂŻtĂ©" mais signifie au contraire, un genre d'ĂȘtre dĂ©terminĂ© du "je" lui-mĂȘme, par exemple celui de s'ĂȘtre-soi-mĂȘme-perdu.
Mais l'interprĂ©tation positive du Dasein donnĂ©e jusqu'ici interdit dĂ©jĂ elle aussi de prendre l'ĂȘtre-donnĂ© formel du je comme point de dĂ©part quand est visĂ©e une rĂ©ponse phĂ©nomĂ©nalement satisfaisante Ă la question "qui ?". La clarification de l'ĂȘtre-au-monde a montrĂ© qu'il n'y a pas d'emblĂ©e et que jamais non plus n'est donnĂ© un sujet dĂ©pourvu de tout monde. Et c'est ainsi qu'il n'est en dĂ©finitive pas davantage donnĂ© d'emblĂ©e un je isolĂ© sans les autres.