Dire qu'une norme se rapportant Ă la conduite d'ĂȘtres humains « est valable », c'est affirmer qu'elle est obligatoire, que ces individus doivent se conduire de la façon qu'elle prĂ©voit. DĂ©jĂ dans un chapitre prĂ©cĂ©dent, on a expliquĂ© qu'Ă cette question de savoir pourquoi une norme est valable, c'est-Ă -dire pourquoi des individus doivent se conduire de telle ou de telle façon, on ne peut pas rĂ©pondre en constatant un fait positif, un fait qui est, et qu'ainsi le fondement de validitĂ© d'une norme ne peut pas se trouver dans un semblable fait. De ce que quelque chose est, il ne peut pas s'ensuivre que quelque chose doit ĂȘtre; non plus que, de ce que quelque chose doit ĂȘtre, il ne peut s'ensuivre que quelque chose est. La validitĂ© d'une norme ne peut avoir d'autre fondement que la validitĂ© d'une autre norme. En termes figurĂ©s, on qualifie la norme qui constitue le fondement de la validitĂ© d'une autre norme de norme supĂ©rieure par rapport Ă cette derniĂšre, qui apparaĂźt donc comme une norme infĂ©rieure Ă elle. [...]
Comme on l'a notĂ© dans un alinĂ©a prĂ©cĂ©dent, la norme qui constitue le fondement de validitĂ© d'une autre norme est par rapport Ă celle-ci une norme supĂ©rieure. Mais il est impossible que la quĂȘte du fondement de la validitĂ© d'une norme se poursuive Ă l'infini, comme la quĂȘte de la cause d'un effet. Elle doit nĂ©cessairement prendre fin avec une norme que l'on supposera derniĂšre et suprĂȘme. En tant que norme suprĂȘme, il est impossible que cette norme soit posĂ©e, â elle ne pourrait ĂȘtre posĂ©e que par une autoritĂ©, qui devrait tirer sa compĂ©tence d'une norme encore supĂ©rieure, elle cesserait donc d'apparaĂźtre comme suprĂȘme. La norme suprĂȘme ne peut donc ĂȘtre que supposĂ©e. Sa validitĂ© ne peut plus ĂȘtre dĂ©duite d'une norme supĂ©rieure; le fondement de sa validitĂ© ne peut plus faire l'objet d'une question. Nous appellerons une semblable norme, une norme supposĂ©e suprĂȘme : la norme fondamentale.